La version originale de ce blogue a été écrite par Stuart Shanker et publiée en anglais.
Les différents types de « Pourquoi ? »
Les parents de nouveau-nés se demandent toujours « Pourquoi ? ».
« Pourquoi pleure-t-elle ? Est-ce qu’il a faim ou peur ? Est-ce qu’il est mouillé ? Est-ce qu’elle se sent seule ou s’ennuie ? » Comme nous ne pouvons pas leur poser ces questions, nous mettons notre casquette de détective. Nous repensons à des situations passées, nous avançons à tâtons, nous consultons quelqu’un qui est compétent.
Les choses commencent à changer vers l’âge de trois ans, quand nous commençons à demander aux enfants « Pourquoi ? ». « Pourquoi est-ce que tu pleures ? », « Pourquoi as-tu frappé ta sœur ? », « Pourquoi as-tu pris le jouet de ton ami ? » Mais nous obtenons rarement une bonne réponse à ces questions, voire une réponse tout court.
Au fur et à mesure que les enfants grandissent, « Pourquoi ? » devient un outil important pour les aider à gagner en maturité. Ils peuvent maintenant commencer à expliquer ou à justifier pourquoi ils ont fait telle ou telle chose. Leur demander pourquoi peut les aider à comprendre que ce qu’ils disent et font a des conséquences.
Et puis il y a les crises de nerfs, qui peuvent survenir à tout âge, et pas seulement quand ils sont tout petits. Elles nous ramènent au désarroi de la petite enfance. Il est alors inutile d’essayer de parler ; au contraire, nous devons repasser directement au mode « détective ».

Self-Reg aborde ces différents types de « Pourquoi » à travers la métaphore du cerveau triunique de Paul MacLean, c’est-à-dire l’idée que le cerveau humain est composé de trois systèmes neuronaux distincts. Au bas de l’échelle se trouve le cerveau reptilien : un système ancien qui prend le dessus quand nous sommes menacés. Self-Reg l’appelle le Cerveau Gris.
Au-dessus se trouve le Cerveau Rouge « mammalien » où les émotions et les pulsions fortes sont déclenchées et où toutes sortes de mécanismes de communication et de socialisation fonctionnent « sous le seuil de la conscience ».
Et tout en haut se situe le « néocortex » : le Cerveau Bleu. C’est lui qui nous permet de penser, planifier, apprendre, parler, être conscient des autres et avoir conscience de nous-mêmes.
Selon la vision de MacLean, se développer revient à grimper le long de ce névraxe tricolore. Mais le mouvement peut aller dans les deux sens, en fonction du niveau de stress que nous subissons. Plus nous sommes calmes, plus le Cerveau Bleu est aux commandes. Plus le stress est important, plus le Cerveau Rouge prend le dessus. Et dans les situations d’urgence (réelles ou imaginaires), le Cerveau Gris prend le contrôle total.
Quand les enfants sont dans un état de Cerveau Bleu, leur demander pourquoi ils ont fait quelque chose peut les aider à apprendre à faire des choix plus judicieux. En revanche, quand ils se trouvent dans un état de Cerveau Rouge, ils agissent sans réfléchir : leurs comportements sont causés, et non pas motivés par une raison. Dans ces situations, la question « Pourquoi ? » a une valeur plus rhétorique qu’interrogative. Et quand les enfants virent à l’état de Cerveau Gris, ils sont en rage, inconsolables, incapables de comprendre ce que nous disons. Lorsqu’un enfant est dans cet état, nous devons passer de la troisième à la première vitesse : de l’enseignement à l’apaisement. Et nous devons essayer de comprendre pourquoi une telle situation s’est produite.
Quand un enfant passe à l’état de Cerveau Gris, c’est toujours pour la même raison : un excès de stress. Mais ce qui complique les choses, c’est que l’enfant est souvent confronté à du stress « caché » : des choses qui lui font dépenser beaucoup d’énergie sans qu’il s’en rende compte. Et il y a toujours une panoplie de stress en jeu. Le plus difficile est d’en déterminer la nature exacte.
La règle de base qui fonctionne ici est la suivante : quand nous sommes soumis à un stress excessif, nous régressons. Nous descendons l’échelle du névraxe. Ce phénomène se vérifie tout au long de la vie, mais plus l’enfant est jeune, plus il est fréquent et rapide. Cet élément est particulièrement important pour les enfants de la maternelle où, comme nous le verrons dans le prochain article, ils sont exposés à une augmentation considérable de leur charge de stress.
Quel que soit l’âge de l’enfant, quand nous posons la question « Pourquoi ? », nous devons déterminer lequel de ces « Pourquoi ? » nous demandons. Nous devons peut-être recadrer le comportement de l’enfant, c’est-à-dire voir et comprendre ce comportement d’une manière différente : reconnaître quand il s’agit d’un comportement de stress et non d’un mauvais comportement.